CIAO DATE: 07/2014
Volume: 91, Issue: 91-92
Fall/Winter 2013
Iconographies rebelles (PDF)
Pierre Piazza, Xavier Crettiez
Si pour certains les inscriptions murales dans les grandes agglomérations traduisent un simple besoin d’embellir, pour d’autres un désir de subvertir, quelques régions ou pays connaissent un usage nettement plus immédiatement idéologique des façades urbaines. L’iconographie et l’écriture sauvage ont ainsi fleuri lors des printemps arabes, pérennisant une pratique de la contestation que les caméras du monde entier ont subitement mise en lumière . Ailleurs, comme en Irlande du Nord, au Pays Basque ou en Corse, les velléités rebelles associent un usage de la violence physique à une pratique intensive du bombage militant dont les Murals de Belfast aux dimensions impressionnantes constituent l’exemple le plus célèbre . Si les zones en conflit sont souvent propices à un investissement des murs publics, instituant les référents belliqueux ou les mots d’ordre idéologiques en éléments culturels de la guerre, d’autres espaces publics plus pacifiés offrent de semblables opportunités pour se fa...
Pour une iconographie de la contestation (PDF)
Alexandre Deze
Des affiches de mai 68 aux murals républicains de Belfast, des peintures anti-apartheid de Paul Pieter Piech au badge « Touche pas à mon pote » de SOS Racisme, l’image fixe apparaît a priori indissociable des phénomènes contestataires. Imagine-t-on aujourd’hui une manifestation, une grève ou un sit-in sans pancartes ou banderoles illustrées ? Pourtant, aussi omniprésentes soient-elles, les images protestataires restent peu étudiées par les spécialistes de l’action collective. Cet article ambitionne précisément de montrer l’intérêt d’une approche iconographique de la contestation et cherche à en poser les principaux fondements épistémologiques et méthodologiques. Il s’interroge tout d’abord sur les raisons de l’absence de l’image dans les travaux sur les mobilisations contestataires. Il tente ensuite de construire l’image comme objet d’étude légitime de la sociologie des mouvements sociaux. Il entend enfin démontrer en quoi l’image peut constituer un matériau de travail heuristique, susceptible d’enrichir notre connaissance des phénomènes contestataires.
L'iconographie révolutionnaire en mutation (PDF)
Philippe Buton
L’iconographie révolutionnaire oscille de façon permanente, au regard des expressions graphiques qui l’ont précédée, entre continuités graphiques et ruptures symboliques. L’auteur examine deux exemples précis. En premier lieu l’iconographie communiste au xxe siècle et ses inventions graphiques (faucille et marteau, étoile rouge, globe terrestre). Puis l’article détaille les quatre phases de l’iconographie de l’extrême-gauche française, des années 1960 jusqu’à nos jours.
De la pratique militante à la fabrication du patrimoine (PDF)
Francesca Cozzolino
S’appuyant sur des données ethnographiques issues d’un travail de terrain de longue durée, cet article interroge le rapport entre une pratique artistique spécifique et le politique et analyse le changement de statut des peintures murales d’Orgosolo (Sardaigne), autrefois activité politique, aujourd’hui devenues un bien patrimonial. Nous montrons comment ces murales sardes ne représentent plus aujourd’hui une volonté de contestation, mais répondent à des situations et à des conventions qui font de ces artefacts graphiques des objets patrimoniaux.
La grammaire iconographique de la révolte en Syrie : Usages, techniques et supports (PDF)
Cecile Boex
Cette contribution explore les usages, les techniques ainsi que les registres de l’iconographie produite par les acteurs de la révolte en Syrie du point de vue des manières dont ils mobilisent les technologies ordinaires de diffusion et de création numériques. Il s’agit de mieux comprendre comment les espaces physiques des actions protestataires et l’espace virtuel et disséminé d’Internet s’articulent dans la visibilité et la mise en récit de l’action collective à travers la production et la circulation d’objets, de supports et de dispositifs iconographiques singuliers. L’analyse porte d’abord sur les usages de l’iconographie au sein des actions protestataires dans leurs fonctions organisationnelles, communicationnelles mais aussi performatives. Le deuxième temps est consacré à l’iconographie dématérialisée circulant sur la Toile, à partir d’un examen de différentes séries d’affiches numériques afin d’en éclairer les répertoires visuels et symboliques.
Récits et cadrages politiques en Euskadi : lectures de l'iconographie abertzale (PDF)
Xavier Crettiez
Une traversée du Pays basque offre assez rapidement à voir les marques de l’existence d’un conflit politique au cœur même d’un paysage d’une douceur peu commune. Ce ne sont pas tant les signes d’une possible militarisation de l’espace public – de moins en moins évidente à partir du début des années 2000 – qui troublent l’observateur, que les inscriptions nombreuses et difficilement compréhensibles qui ornent les murets routiers et les façades des immeubles. Graffitis, affiches, pochoirs, dessins viennent rappeler, dans une langue faiblement répandue qui renforce le sentiment d’emprise communautaire de l’espace public, la force d’une politique informelle dans cette région à cheval sur deux États puissants. Par politique informelle, on entendra avec Michel Offerlé et Laurent le Gall, des
Sociologie d'une conversation silencieuse (PDF)
Pierre Piazza, Xavier Crettiez
S’appuyant sur un travail de terrain réalisé en 2010 et 2011, cet article propose une analyse des traces iconographiques et inscriptions nationalistes qui colonisent l’espace public en Corse. Il explicite les usages multiples – stratégiques, identitaires et cognitifs – de cette mise en scène visuelle de la contestation au travers de laquelle s’exprime un nationalisme de la quotidienneté (banal nationalism). Il s’intéresse également à la réception par ceux qui y sont confrontés, de ces messages constituant de véritables marqueurs identitaires de l’espace insulaire. Laissent-ils indifférents ou leur accorde-t-on une quelconque importance ? À quels interprétations et jugements donnent-ils lieu ?
Fabrice Andreani
Proliférant sur les murs publics des barrios pauvres comme des centre-ville du Venezuela à mesure de l’institution controversée d’un gouvernement « révolutionnaire » bolivarien (au début du siècle), l’iconographie populaire vénézuélienne est autant l’objet de politiques publiques « participatives » que d’initiatives transgressives autonomes vis-à-vis des agendas partisans. Située à la confluence des mondes de l’art de la guérilla des années 60-70 et de la contre-culture hip-hop, elle oscille entre propagande « anti-impérialiste » chaviste, dispute du leadership de la bourgeoisie bolivarienne et critique « a-politique » des ordres marchand et policier. À l’aune des processus de production et d’exposition d’œuvres d’artistes réputés pour leur irrédentisme, leur électoralisme ou leur a-politisme, l’article explore les logiques socio-spatiales de (dé)légitimation de la « révolution » aux marges du chavisme, et les limites propres aux causes politico-artistiques, séditieuses ou non.
Logiques et ressorts de l'iconographie anti-biométrique en France (PDF)
Pierre Piazza
En France, l’iconographie a joué à travers l’histoire un rôle non négligeable tant dans les entreprises étatiques destinées à légitimer la nécessité d’instituer certains dispositifs d’identification des personnes que dans les mobilisations dénonçant les dangers des initiatives prises par les pouvoirs publics en la matière. Au regard des expériences du passé, cet article montre comment l’image est devenue un instrument majeur du répertoire d’action contestataire des anti-biométrie. Il s’intéresse aussi à la manière dont ces derniers y recourent en investissant principalement quatre thématiques en vue de sensibiliser à leur cause : l’humour, l’histoire, l’enfance et le corps.