Columbia International Affairs Online: Journals

CIAO DATE: 11/2008

REGARDS SUR L’ENTRE DEUX: Lettre to the Junta of le Monde

Cultures & Conflits

A publication of:
Cultures & Conflits

Volume: 65, Issue: 0 (Spring 2007)


Jean-Pierre Faye

Abstract

Full Text

J'écrirai à la Junte du Monde, surtout si le temps se faisait plus perméable à la transmission des expériences, des doutes, des grosses certitudes.

Je dirai : oui, j'étais à la fenêtre, j'attendais de voir.

Je voyais le fils ramasser les médicaments pour sa mère, les sachets pharmaceutiques dans sa main.

En passant le fils était vu par sa mère, voyant le petit R. qui se faisait attaquer par les forces de l'ordre.

La mère a vu le fils dire aux forces de l'ordre : Laissez-le, il n'a rien fait. Il y avait la force de l'ordre qui avait contrôlé le petit R., qui, lui, est parti chercher les papiers de la voiture juste là, à côté. La force de l'ordre est venue par derrière en courant et a frappé le jeune R. et l'a fait tomber par terre. Le fils de la mère qui regardait par la fenêtre, a essayé de ramasser le petit R. de par terre. La mère a vu son fils bousculé par la force de l'ordre et elle l'a vu, elle est descendue, et une fois descendue elle a vu l'une des forces de l'ordre munie d'un flash-ball en face de sa fille et qui tirait sur sa fille.

La force de l'ordre a tiré deux fois. Un cousin est venu face à la force pour protéger la cousine, il s'est fait brûler l'estomac pour la protéger. La mère est partie derrière son fils. Elle n'a pas calculé les coups de feu. La force de l'ordre tirait son fils, et elle, tirait son fils vers elle-même, de son côté. Elle disait : il est hors de question que je donne mon fils à la force de l'ordre. Mais la force de l'ordre est devenue plus forte qu'elle, et l'a bousculée par terre et l'a blessée. Elle a été obligée de faire venir un médecin, elle a même pas osé porter plainte contre la force de l'ordre. Elle a dit : Non, car ça change rien, elle s'est dit : mon fils est là-bas, il est là-bas, donc ils vont faire le mal à mon fils, je préfère que je souffre, moi, pas mon fils, pour protéger mon fils.

A ma fille on a demandé : Vous êtes descendue à cause du bruit ? Elle répondait : En fait nous on était déjà en bas sur le parking, mon amie et moi. Et c'est là qu'on a tout vu, tout ce qui s'est passé.

D'un coup ils sont arrivés, on a rien compris, ils criaient, ils tiraient en l'air avec des flash-balls, on savait pas pourquoi : les jeunes étaient tranquilles, on était que nous, les sœurs, le cousin qui essayait de protéger ma sœur. Ma sœur était affolée. Les forces de l'ordre étaient autant affolées que nous, elles avaient plus peur que nous. Elles avaient peur qu'on s'attaque à elles. Elles nous ont pris pour des rasques, des raches, des rascailles, des rasicares, des... Ils ont vraiment cru qu'il y avait une émeute, alors qu'on était cinq filles.

La route était bloquée de partout avec les camions, le quartier est bouclé. On dirait qu'ils sont descendus avec la pluie.

La candidate était au milieu, entre ses compétiteurs. Puis elle était seule parlant à la foule, à qui elle disait vouloir l'écouter sur la vie et son prix. Elle demandait quel était et quel serait le prix de la vie. La multitude l'écoutait qui était à l'écoute, elle lui demandait même comment penser au plus vrai les impôts, mais les hommes intervenaient. Les uns disaient qu'ils ramèneraient les impôts comme avant, d'autres disaient aussitôt : vous l'avez entendue, elle ramènera les impôts comme avant, vous savez maintenant ce que la candidate fera même si elle n'a encore rien dit. Chacun parlait à sa place plus fort les uns que les autres. Elle ramassait ses papiers et se levait, pour cette fois-ci, et debout tenant le niveau, est partie.

Il faudrait, je voudrais décrire le machisme éternel de la Junte du Monde - à laquelle se joignait d'ailleurs la dame tout autre qui prenait le thé à cinq heures avec le Tortionnaire des Andes, était fort à l'aise avec une bonne Moitié de la Junte du Monde et qui l'invitait à goûter ou dîner pour parler de l'autre Moitié. Mais le machisme de la Junte du Monde se déploie, tel qu'il s'est mobilisé et déchaîné de tous côtés contre une seule, elle, candidate et souriante parmi tous les traits lancés par la Junte du Monde. Au centre, siège le Carré des Quatre, parmi ses représentants les mieux affirmés et aux succès variables, mais à férocité persistante, il compte à ses quatre coins Pinochet, Saddam, Bush, Ahmadinejad, assez bons amis au fond entre eux malgré tout, ainsi que le cinquième, et se renvoyant bien la balle, malgré certains points et des divergences de gros détail, morts ou bien vifs, ainsi que leurs tueurs déclassés, actuels ou virtuels déjà, mais unanimes dans leur façon de donner à leurs suiveurs abêtis l'ordre de faire mourir.

Ce document exact et authentifié est découvert et recueilli en partie par Natacha Flandin qui est, pour cette partie-là, remerciée. D'autres éléments découverts par la raison sont des extraits simples de la confusion globale, laquelle a régné et règne sur le monde, gérée exactement par la Junte du Monde.

La question est de savoir si les uns et les autres sont comptés.

document simplement trouvé en chemin,

par Jean-Pierre Faye et

par les Cinq Sens

réunis